Quand les marques de luxe brûlent leurs invendus
Si les soldes sont chaque année - à deux reprises d'ailleurs - attendus des consommateurs moyens, ce n'est peut-être pas le cas des grandes enseignes de luxe.
Une enquête menée par le magazine Challenges vient en effet de révéler que plutôt que de brader le stock invendu des collections écoulées, certaines maisons prestigieuses iraient jusqu’à préférer… brûler ces items désormais impossibles à commercialiser. Des déclarations chocs, mettant une nouvelle fois le doigt sur la considération extrême d’une réputation du luxe, au détriment de son accessibilité au plus grand nombre.
Les enseignes de luxe ne sont pas promptes à brader leurs collections. Les soldes y sont inexistants, remplacés le plus souvent par des sessions de ventes privées, exclusivement réservées à quelques clients triés sur le volet. Mais cette pratique ne constituerait en vérité qu’une partie immergée de la politique d’écoulement des pièces invendues. D’après les conclusions d’une enquête menée sur les agissements de la maison Hermès, les marques soucieuses de leur prestige n’hésiteraient pas à avoir recours à des pratiques bien moins louables quant au stock demeurant invendu après chaque collection. Ainsi, en laissant la parole à un ancien dirigeant de cette grande maison du luxe, Challenges lève le voile sur une démarche condamnable, habituellement usitée au sein de l’enseigne renommée.
Au terme de chaque collection, Hermès laisserait ainsi l’opportunité à une dizaine de ses employés – tirés au sort, et tenus de conserver cette pratique confidentielle – d’acquérir l’une des pièces demeurant en stock. Or, ne pouvant pas par ce biais se débarrasser de tous les items présents dans cette ancienne collection, Hermès procède ensuite à une opération d’épuration ultime. Plutôt que de proposer ce panel de pièces restantes à un prix plus attractif pour le consommateur et ainsi terminer de l’écouler, la marque se rend à “l’incinérateur de Saint-Ouen”, où elle se débarrasse donc du surplus en brûlant les invendus. La raison ? Ne pas égratigner l’image prestigieuse, luxueuse, inaccessible finalement, de la grande maison du luxe.
C’est la solution ultime quand toutes les autres ont été épuisées. Hermès a conscience qu’en termes d’image, c’est délicat, mais c’est la seule façon de conserver l’exclusivité de la marque.
Une nouvelle preuve que l’industrie du luxe cherche finalement, avant de satisfaire le consommateur, à asseoir une hégémonie ostentatoire parmi une population privilégiée. A l’image d’un Mike Jeffries, PDG d’Abercrombie & Fitch, qui, s’il ne vise toutefois pas le même public nanti, déclarait récemment ne pas souhaiter associer l’image de sa griffe aux “pauvres”, incompatibles avec la philosophie cool promue. Le luxe, un outil de domination sociale ?